mardi 29 décembre 2009

Donner des cadeaux

Comme je vous l'ai déjà mentionné dans ma réflexion sur Noël, le fait de s'échanger des cadeaux en cette fête n'est pas vraiment quelque chose que j'apprécie. En fait, ça n'a plus vraiment de sens à mes yeux.

Quand j'étais enfant, j'aimais recevoir des cadeaux à Noël. Je n'avais à cet âge qu'un faible pouvoir d'achat. Si bien que si je voulais quelque chose le moindrement coûteux, il me fallait nécessairement le demander en cadeau pour ma fête ou pour Noël. Aujourd'hui, bien que je sois de revenu plutôt modeste, je dispose néanmoins de suffisamment de moyens pour m'acheter ce que je veux quand j'en ai besoin. Conséquemment, ce que je recevrai pendant les fêtes sera toujours quelque chose de plutôt superflu ou alors que j'aurais très bien pu m'acheter moi-même (au lieu d'acheter un cadeau pour la personne qui me l'aura acheté).

Il y a, en plus, différents inconvénients supplémentaires au rite d'échange de cadeaux. D'abord le fait d'avoir à trouver un cadeau pour chaque personne peut être difficile. Ça prend de l'inspiration. J'aimerais pouvoir faire des cadeaux à n'importe qui, n'importe quel jour de l'année, si par exemple je vois quelque chose et que je me dis que ça plairait à l'un de mes proches. Mais à Noël c'est trop artificiel. Ça devient un devoir. Si l'on est obligés de se dire les uns les autres ce que l'on désir recevoir, ça revient presque au même que d'aller se l'acheter soi-même.

Ensuite, il y a le fait que l'on n'aura pas nécessairement ce que l'on veut. Bien sûr, on peut demander quelque chose de précis, mais même dans ce cas-là on n'aura peut-être pas le modèle ou la marque qui nous aurait vraiment plût et que l'on aurait choisie si l'on se l'eut acheté soi-même. Par exemple, si je demande une balayeuse, je n'en obtiendrai peut-être pas une qui me plaît. Et, une fois que j'en aurai une, je ne pourrai plus vraiment m'en acheter une à mon goût tant que celle-là fonctionnera.

En plus, durant la période qui précède les fêtes, je dois me retenir de m'acheter des choses dont j'ai besoin, au cas où l'on déciderait de me les offrir en cadeaux. Et, une fois les fêtes passées, je n'ai plus les moyens de m'acheter ces choses dont j'ai besoin et que je n'ai pas reçues en cadeaux.

Faisons un exercice. Prenons ces deux variables :
  • X = Tout ce que nous avons reçu comme cadeaux à Noël cette année.
  • Y = Tout ce que nous avons dépensé à Noël cette année pour acheter des cadeaux à ceux de qui nous en avons reçu.

Si l'on nous proposait comme transaction de payer Y pour acheter X, nous refuserions probablement. Et ce n'est pas parce que l'on donne plus que ce que l'on reçoit, c'est simplement parce que ce que l'on reçoit ne nous plaît pas suffisamment ou n'est pas suffisamment nécessaire pour qu'il vaille la peine de débourser une telle somme pour l'acquérir. Et c'est là qu'est moins point. Tout ce rituel d'échange de cadeaux n'a de valeur que symbolique et traditionnelle. C'est une sorte de potlatch ou de contredon. Un sacrifice d'argent sur l'autel du capitalisme. Mais il est, en soi, nuisible pour tout ceux qui y participent.

L'autre jour, j'ai croisé un vendeur du journal L'Itinéraire qui disait aux passants de donner de l'argent pour aider les sans-abri en utilisant comme argument que «C'est le temps des fêtes, c'est le temps d'être généreux!» Et moi je me suis dis que, justement, c'était le temps de l'année où j'avais le moins les moyens de donner aux pauvres puisque j'avais trop de cadeaux à acheter pour mes proches. C'est ce qui m'a fait me dire que le rite d'échange de cadeaux n'avait aucun sens et était même paradoxal. Il est sensé se baser sur une sorte de désir d'être généreux alors qu'il n'est en fait qu'un devoir nous empêchant d'être généreux envers ceux qui en ont vraiment besoin.

Bref, pour moi le fait de donner à Noël n'a de sens que si c'est à quelqu'un qui n'en a pas les moyens; comme un enfant ou une victime de la pauvreté. Je crois que l'année prochaine, je vais simplement dire à mes proches : «Donnez-moi rien comme cadeaux parce que moi je ne vous donnerai rien!» Et juste pour pas qu'on me prenne pour un égoïste, je donnerai l'argent que j'ai économisé à une œuvre de charité.

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P.S. – Et je ne dis pas ça parce que j'ai été déçu de mes cadeaux ou quoique ce soit du genre. Je suis correctement satisfait de ce que j'ai reçu. C'est simplement une réflexion qui me vient chaque année pendant que j'achète mes cadeaux de Noël.

lundi 28 décembre 2009

Les mythes pour enfants

Afin de divertir et d'émerveiller les enfants, on leur raconte souvent des histoires qui ne sont pas réelles; comme les contes de fées par exemple. On fait intervenir dans ce type de récit toute sortes d'éléments fantaisistes et surnaturels auxquels les adultes qui les racontent ne prêtent pas foi.

Là-dessus je n'ai rien à redire, bien que je demeure convaincu que l'on peut susciter chez l'enfant de l'émerveillement pour les réalités scientifiques autant que pour des histoires fantastiques. Il me semble que l'on pourrait très bien lui apprendre à s'émerveiller des vraies choses de la vie : l'araignée qui tissent sa toile, le mouvement des planètes ou la complexité de notre organisme. Le faire s'émerveiller de choses grotesques et absurdes le rendra blasé de la vie à l'âge où il saura que toute ces salades sont fausses.

Malgré tout, il n'y a rien de mal là-dedans. Même si l'on sait que l'enfant, tant qu'il n'aura pas atteint un certain âge, ne pourra pas distinguer la réalité de la fiction, et donc qu'il prend très certainement cette histoire fictive pour un fait vécu, on ne lui ment pas en ne faisait que lui raconter l'histoire en question. Lorsqu'il aura acquis la maturité requise, il pourra départager le vrai du faux et nous demander directement ce qu'il en est au besoin.

Toutefois, je trouve qu'il n'est pas correct d'affirmer explicitement que ces histoires sont véridiques. Par exemple, l'histoire du Père Noël ou de la fée des dents. On ne fait pas que raconter une histoire fantaisiste, on tente délibérément de faire croire à l'enfant qu'elle est authentique en manigançant une mise en scène (mettre des cadeaux sous le sapin pendant la nuit) et en falsifiant les preuves. Bien sûr, le mensonge n'est pas mal en soi, mais il faut réfléchir à ses conséquences avant d'en user. Pour moi, cette tradition de raconter des contes à nos enfants en les faisant passer pour vrais n'est pas compatible avec le désir qu'ils développent leur capacité à réfléchir et leur esprit critique. Au contraire, c'est désirer que notre enfant vive dans une joyeuse illusion plutôt que dans la réalité; c'est de l'obscurantisme.

Et c'est encore pire si l'enfant nous pose directement la question «Est-ce que le Père Noël existe vraiment?» et qu'on lui répond par l'affirmative. Qu'espère-t-on en lui mentant ainsi? Qu'il y croit pour toujours? Pourquoi serait-il désirable que notre enfant croie le plus longtemps possible en ce genre de faussetés? Il me semble que l'on devrait au contraire nous réjouir du fait qu'il ait pu remettre en question ses propres croyances au point de nous poser lui-même cette question. On devrait l'aider dans le développement de sa raison plutôt que de l'inhiber de la sorte. Par ailleurs, si on ne lui dit jamais la vérité, l'enfant pourrait aussi bien y croire pour toujours. La preuve c'est que l'on continue souvent d'avoir foi aux croyances irrationnelles qu'on nous a enseigné avant que l'on n'atteigne l'âge de raison.

Je suis toutefois un peu moins à l’aise de dire la vérité à un enfant s’il me demande, par exemple, «Qu’est-ce qui se passe quand on meurt?» Je ne me vois pas lui dire qu'il n'y a rien après la mort, provoquant ainsi une crise existentielle, mais il n'est pas question non plus que je lui dise que l'on va au Paradis. Je pourrais toutefois, si un enfant me demande où se trouve un être décédé, me contenter de lui dire qu'il se trouve «dans le passé». Son esprit d'enfant, ne comprenant pas la signification de mes paroles, considérera le passé comme un lieu, au même titre que le Paradis, et trouvera réconfort en se disant que ses proches décédés s'y trouvent. En vieillissant, il pourra prendre conscience de la réalité lorsqu'il aura acquis la maturité nécessaire; ou alors substituer le mot «passé» par «paradis» s'il choisit la voie de l'obscurantisme. Ce serait donc comme lui raconter un conte de fée sans prétendre que c'est la vérité.

Bref, pour en revenir au sujet de départ, je dirais qu'il est correct de raconter aux enfants l'histoire du Père Noël comme on leur raconte celle du Petit Chaperon Rouge ou de Spiderman, mais que c'est un peu leur manquer de respect que de leur faire croire activement que cette fiction est réelle.

lundi 21 décembre 2009

Faut-il suivre son intuition?

Qu'est-ce donc exactement que l'intuition? Une sorte d'instinct vestigial? La voix de Dieu? Doit-on l'écouter ou l'ignorer?

Je pense personnellement que l'intuition est une sorte de «raisonnement inconscient», c'est-à-dire que notre cerveau aura fait une réflexion quelconque mais ne nous en aurait donné que la réponse sans révéler sa démarche. L'attitude la plus sage par rapport à nos intuitions serait donc d'essayer de comprendre leur logique, puis d'en évaluer la justesse, avant de nous y fier.

Par exemple, si je croise un homme dans la rue et que je ressens de la méfiance envers lui, je ne dois ni ignorer ce sentiment ni m'y soumettre aveuglément, je dois l'analyser. Si je me rends compte que je me méfie de cet homme simplement parce qu'il ressemble à l'acteur qui jouait le méchant dans un film que j'ai vu la veille, je m'apercevrai que mon intuition négative était injustifiée. Mais mon intuition sera pertinente si je constate plutôt que cet homme ressemble au dangereux criminel évadé de prison que j'ai vu aux nouvelles la veille et que ce peut fort bien être lui.

On peut toutefois se permettre de suivre aveuglément notre intuition dans un contexte où l'on n'aurait pas le temps de l'analyser et où le bénéfice qu'on en tirerait serait supérieur à la nuisance potentielle pour autrui. Par exemple, s'il s'agit simplement de changer de trottoir parce que j'ai le pressentiment que l'individu que je m'apprête à croiser est dangereux, je puis le faire sans me poser trop de questions étant donné que mon geste ne porte préjudice à personne. Si par contre j'évite d'engager une personne compétente parce que j'ai un mauvais pressentiment à son égard, écouter mon intuition pourrait lui être préjudiciable

Pour beaucoup de croyants, la voix de leur intuition est en fait celle du Tout-Puissant Créateur de l'Univers qui s'adresse à eux directement. Mais en sont-ils vraiment si sûrs? Je propose cette mise en situation pour vérifier :
Tu es coincé avec plusieurs personnes dans une pièce où se trouve une bombe. Heureusement, il y a un membre de l'escouade anti-bombe parmi vous. Il tente donc de désamorcer l'engin explosif, mais s'arrête en disant: «Il y a quatre fils… un bleu, un rouge, un vert et un jaune. Je dois en couper un et un seul… mais je ne sais pas lequel.» il se dit pourtant intérieurement : «…mais j'ai l'intuition que c'est le bleu.» La plupart des gens qui sont là ont, quand à eux, l'intuition qu'il faut couper le fil rouge. Il y a un prêtre parmi vous; ce dernier a l'intuition qu'on doit couper le fil vert. Finalement, ta propre intuition te recommande de couper le fil jaune.

Quel fil devrais-tu couper? Quelle intuition devrais-tu suivre? La tienne? Celle de la majorité? Celle du spécialiste? Ou celle de l'homme qui prétend être en contact avec un dieu omniscient?

Il est évident que c'est l'intuition du spécialiste qu'il faut suivre. Il y a plus de chances pour que son raisonnement inconscient ait utilisé des données pertinentes puisées quelque part dans son cerveau, que l'intuition d'une personne qui ne connaît rien dans ce domaine.

Les animaux se mangent entre eux

Lorsque je confesse mon végétarisme, il n'est pas rare que j'entende l'argument suivant :
«Mais les animaux se mangent entre eux! Donc c'est correct|naturel|nécessaire qu'on les mange aussi.»

Analysons donc cet argument. On peut en fait l'interpréter de plusieurs manières. Le premier sens possible serait que, compte tenu que les animaux commettent cet acte de tuer d'autres animaux, alors ils ne méritent pas mieux que d'être tuées eux aussi. Comme je vous l'ai déjà mentionné dans ma réflexion sur la justice, pour moi la seule souffrance qu'il soit légitime d'infliger à un individu étant source de souffrances, c'est la souffrance minimum requise pour qu'il cesse lui-même de causer de la souffrance. Donc tuer les animaux pour cette raison est aussi peu légitime que la peine de mort le serait pour l'humain.

Par ailleurs, les animaux que l'on mange ne sont pas des tigres ou des loups. Ce sont des vaches, des poules et des cochons. Ces animaux ont tous une alimentation exclusivement végétale (sauf lorsqu'on ajoute de la farine animale à leur moulée). Pour que cet argument soit cohérent (ce qui ne le rendrait pas plus éthique) il faudrait que celui qui l'utilise se nourrisse exclusivement d'animaux carnivores.

Troisième point, c'est que les animaux qui se nourrissent d'autres animaux n'ont pas vraiment d'autres alternatives. Le loup ne peut survivre sans viande. Et même si ce serait théoriquement possible de lui concevoir des substituts, le loup a la capacité de se pourvoir en viande mais pas celle de cultiver un champ de soya. Cette prédation est un acte de survie, donc de l'égoïsme légitime. L'humain n'a pas cette excuse. Nous pouvons très bien vivre en nous passant de viande.

De toute façon, comme l'animal est un être irrationnel, ses agissements ne sont aucunement régis par une quelconque éthique. Il suit son instinct et son intuition. Un chat peut torturer une souris pendant des heures par pur plaisir. Quelques uns de mes détracteurs s'arrêteront sur ce fait en arguant que l'on n'a aucun devoir moral envers celui qui (en raison de son faible intellect) ne peut prendre d'engagement moral envers nous. Mais si on laissait les vaches ou les poules en liberté, il y a peu de chances pour que, dans leurs activités normales, elles portent atteintes à nos intérêts. Donc si l'on faisait semblant de signer un contrat social avec ces bêtes, aucun de leurs actes ne le transgresseraient.

Par ailleurs, cette vision des choses impliquerait que les humains irrationnels – c'est-à-dire les enfants et les gens atteints d'une déficience intellectuelle – soient également exclus de notre considération éthique pour la même raison. Or, au contraire, on a tendance à être beaucoup plus tolérant envers les humains non doués de raison qui nous causent préjudice, qu'envers ceux qui savent ce qu'ils font. L'irrationalité de la bête impliquerait donc que l'on n'ait moins d'attentes envers sa capacité à respecter nos intérêts, mais pas que l'on ne tienne pas compte des siens.

Une autre façon d'interpréter l'argument intitulant cette réflexion, ce serait qu'il est correct de manger les animaux, non pas pour les punir du fait qu'ils se mangent entre eux, mais parce qu'ils nous montrent l'exemple à suivre. C'est un paralogisme considérant que les actes des animaux sont «naturels» (puisqu'ils ne sont pas «corrompus» par la culture ou la réflexion) et que tout ce qui est naturel est éthique. Il est palpable dans cette déclinaison de l'argument en question:
«Si les vaches étaient carnivores, elles ne se poseraient pas ce genre de questions avant de te manger!»

Interprété dans ce sens, l'argument est fallacieux du fait que les animaux ont moult pratiques que nous ne voudrions jamais prendre en exemple (inceste, viol, etc.). J'ajouterais qu'il est étrange de se vanter d'avoir aussi peu de jugement qu'une vache…

mardi 8 décembre 2009

Réceptivité ou imagination?

Il semble que les histoires incroyables, allant à l'encontre de notre conception du monde, arrivent toujours aux mêmes personnes. On dit qu'elles sont «réceptives», c'est-à-dire que leurs facultés sensorielles (ou extrasensorielles) sont capables de percevoir des choses que le monde normal ne voit pas.

Mettons. Mais suis-je le seul à trouver louche le fait que les gens «sensibles» aux fantômes ont également plus de chances d'apercevoir un vaisseau extraterrestre? Il me semble que le fait de vivre une expérience surnaturelle ou paranormale (à supposer qu'elle soit réelle) est suffisamment rare pour qu'il y ait très peu de chances que la même personne en revive une autre. Non?

Un autre élément que je trouve étrange, c'est que les gens qui vivent une telle expérience – vision de la Sainte Vierge ou enlèvement par des extraterrestres – sont le plus souvent ceux qui croyaient préalablement en ce genre de chose, ou qui y étaient «ouverts». Et, le plus souvent, si on élague leur témoignage de l'interprétation qu'ils en font, on se rend compte qu'ils n'ont fait qu'associer arbitrairement un phénomène sans explication (lumières étranges dans le ciel, bruits bizarres dans une vieille maison, etc.) avec une explication sans phénomène (les esprits, les extraterrestres, etc.) souvent moins pour expliquer l'un que pour justifier leur croyance préalable en l'autre. Le même phénomène (disons, une lumière étrange dans le ciel) pourra avoir une explication différent selon si le témoin croit plus aux extraterrestres ou aux anges.

Et c'est aussi par hasard, je suppose, que l'on considère que les jeunes enfants, les déficients mentaux, les gens qui sont sous l'influence de la drogue, ceux qui jeûnent ou ceux qui sont seul dans un cloître depuis une semaine sont plus «réceptifs» alors qu'ils sont justement plus susceptibles d'halluciner ou de trop croire leur imagination? N'est-il pas douteux que les gens sceptiques subissent moins d'«expériences extraordinaires» que ceux qui y croient? Sont-ce qu'ils dégagent des énergies négatives rebutant les anges et les extraterrestres, ou est-ce plutôt qu'ils ne sautent pas rapidement sur des conclusions hâtives?

Je vais conclure en citant une énième fois cette merveilleuse phrase anti-miracles de David Hume (1711-1776):
«nul témoignage ne suffit à établir un miracle, à moins que (...) sa fausseté en fut plus miraculeuse que le fait qu'il tente d'établir»

Une hallucination est toujours plus probable qu'une entorse aux lois de la physique. L'existence de la faillibilité de nos sens est avérée, celle des esprits et des extraterrestres non. Que les personnes réceptives aient en fait trop d'imagination ou qu'elles soient plus sujettes aux hallucinations, m'apparaît plus probable - selon le principe du rasoir d'Occam - que la véracité de leur témoignage. L'existence réelle des choses (objectivité) nous est confirmée par le fait que l'on est plusieurs à les percevoir (intersubjectivité), mais si je suis le seul à avoir vu ce fantôme, rien ne me dit qu'il existe en-dehors de mon esprit.

lundi 7 décembre 2009

Confluence entre science et éthique

La science et l'éthique sont deux choses distinctes. L'une et l'autre répondant respectivement aux questions «Qu'est-ce que le vrai?» et «Qu'est-ce que le bien?», deux des questions canoniques de la philosophie. Malgré tout, peut-on utiliser une méthodologie semblable pour trouver des réponses à ses deux questions? Sur ce blogue, je vous parle principalement du scepticisme scientifique et de l'éthique utilitariste. Pour moi les deux sont interreliés en une même vision du monde. Ils découlent d'une même attitude face à ses deux questions : terre-à-terre, esprit critique, principe de parcimonie, etc. Essayons de démontrer la filiation de ces deux volets de mon blogue.

Disons que j'essaie de me demander ce qu'est le bien en supprimant ce qui est nié par la science. Par exemple, disons que je prends une éthique théologique voulant qu'un péché soit une faute envers autrui, envers soi-même ou envers Dieu. Il m'apparaîtra alors que je puis supprimer de mes considérations les soi-disant fautes envers Dieu (son existence étant indémontrable, le fait qu'il puisse réprouver certaines de mes actions l'est encore plus). Si l'on adopte une attitude scientifique, on ne peut plus dire que telle action est mal simplement parce que Moïse en aurait reçu l'interdiction divine sur le mont Sinaï ou parce que ça ferait pleurer le p'tit Jésus. Bref, toute éthique basée sur des révélations ou sur une conception surnaturaliste du monde entre nécessairement en contradiction avec la science.

Qu'en est-il des autres éthiques qui sont purement philosophique sans référence au surnaturel? Si l'on utilise une éthique qui prend pour pilier un concept abstrait* on doit prouver que cette abstraction existe «scientifiquement» et qu'il y a une raison logique d'en faire la base de notre éthique. Par exemple, dire que le but de l'éthique serait de nous aider à rester «pur» serait antiscientifique puisqu'il n'y a pas de différence tangible entre le corps d'un homme chaste et celui d'un assassin violeur. Même chose pour n'importe quelle autre de ces variables; que ce soit le devoir, la vertu, l'ordre ou un autre concept du même genre. Ce sont des abstractions, des fictions. Le bonheur et la souffrance, par contre, existent empiriquement. Grâce à la science, on peut donc élaguer notre éthique de toute considération arbitraire pour s'en tenir à la règle d'or : «Considérons les intérêts des autres tel que nous voudrions qu'ils considèrent les nôtres.»

La science contribue également à l'éthique en nous donnant plus de savoir et de pouvoir. Dans les temps passés, on considérait généralement la femme, l'esclave et l'étranger comme ayant moins de droits que l'homme libre natif. C'est grâce à la science que l'on a pu montrer l'infondé de ce genre de discrimination, mais cela n'aurait pas suffit à l'abolir. Si l'on a pu libérer les esclaves et les serfs, c'est parce que l'on dispose maintenant de la machinerie pour suppléer à leur travail sans rémunération. Si l'on a permis aux femmes d'accéder au marché du travail, c'est parce que l'on a maintenant les outils pour accomplir plus rapidement les tâches ménagères et la préparation des repas. Bref, il faut non seulement que l'on sache que cette discrimination est sans fondement, mais il faut également que l'on ait une alternative nous permettant de l'éviter. Ces deux préalables sont comblés par la progression de la science. La prochaine étape sera l'élimination du spécisme, puisque l'on sait maintenant que les bêtes souffrent comme nous (grâce à la biologie et à l'éthologie) et que l'on peut de plus en plus nous passer d'elles tant pour nous habiller que pour nous nourrir ou pour l'expérimentation scientifique.

Finalement, la science nous permet également de voir à plus long terme donc d'anticiper que nos gestes présents auront un impact sur le bonheur et la souffrance dans le futur. Je pense à notre conscience environnementale par exemple. C'est grâce à la science que l'on sait maintenant que les activités humaines ont un impact sur les écosystèmes et le climat.

Bref, le scepticisme scientifique tel que je le conçois va de pair avec l'éthique utilitariste que je prône. Pour moi l'un ne va pas sans l'autre.

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*telle que la souillure et la pureté, le devoir ou la vertu, la loi et l'ordre, la valeur, la hiérarchie, le sacrifice, l'honneur, la justice, le mérite, les principes, la propriété, la dignité, des catégories, la vengeance, le respect de la tradition ou celui de l'ordre naturel des choses.

samedi 5 décembre 2009

Noël n'est pas une fête religieuse

Les fêtes approchent et l'on me dit souvent :
«Toi qui est très athée, tu ne devrais pas fêter Noël puisque c'est une fête chrétienne!»

C'est drôle mais, la dernière fois que j'ai ouvert une bible, je n'y ai vu aucune mention du Père Noël ni de ses rennes ou de ses lutins.* Il n'y a rien non plus dans le Lévitique qui dise «Tu érigeras un sapin dans ta demeures. Des guirlandes et des cannes bonbons, tu y accrocheras!» À part la crèche, l'iconographie du temps des fêtes ne fait pas référence au culte chrétien. Même chose pour Pâques… je vois difficilement de lien entre un gars qui ressuscite et un lapin qui distribue des œufs. Et pourquoi on peut pas manger de chocolat durant le carême? Ça existait même pas dans ce temps-là!

Mon point c'est qu'il y a une différence entre les fêtes religieuses (Nativité, Résurrection) et les fêtes folkloriques qu'on leur a superposés (Noël, Pâques). Elles sont de la même nature que le Jour de l'An, la Saint-Jean-Baptiste, le souper de cabane à sucre ou l'épluchette de blés d'Inde. Ce sont des traditions sans lien avec le surnaturel. Fêter Noël n'est donc pas un geste religieux si je ne mets pas de crèche sous mon sapin et si je n'assiste pas à la messe de minuit. Ça me fait penser à ceux qui voulaient retirer les sapins de Noël des centres d'achat pour une raison de laïcité. Le sapin de Noël est le symbole de cette fête du capitalisme dont les centres d'achat sont les grands temples! En retirer les sapins est aussi absurde que de retirer les crucifix des églises.

Mais c'est vrai que le Noël folklorique n'est pas non plus aligné sur mes valeurs. Gaspiller mon précieux argent pour acheter un paquet d'inutilités à mes proches et recevoir en retour toutes sortes de ramasse-poussière qui iront orner le fond de mon garde-robe avec ceux des années précédentes, est à des lieux de mon mode de vie de simplicité. Le plus beau cadeau qu'on puisse me faire, c'est de m'épargner d'avoir à en donner. Par ailleurs, le banquet de tourtières et de dinde qui y est servi normalement n'est pas vraiment compatible avec mon végétarisme. Toutefois, j'aime bien me réunir avec des gens que j'apprécie. Je continuerai donc de célébrer Noël puisque c'est ce qui se fête dans ma famille et ma belle-famille. Toutefois, quand je suis celui qui organise un party du temps des fêtes, il n'y a pas d'échange de cadeaux.

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*Il n'y a rien non plus qui légitime le Pape, les églises ou le clergé en général, ni rien sur les sacrements, sur l'immaculée conception ou sur les autres dogmes… mais c'est un autre sujet.