jeudi 28 mars 2013

Abolir le statut marital

J'ai récemment été le célébrant à un mariage et, pour cette raison, j'ai encore réfléchis sur cette institution. Surtout que, dans l'actualité ces temps-ci, on reparle du mariage gay puisque la France et les États-Unis songent à faire ce que nous avons fait depuis un bon moment déjà. Bref, je me remets à me dire que l'on devrait remplacer notre concept de «mariage» par quelque chose de plus large que le vieux modèle religieux et, possiblement, à abolir l'état civil de type marié/célibataire/veuf/union libre qui me semble obsolète et non pertinente.

Une de mes amies vit avec les deux mêmes colocs depuis des années. À chaque fois qu'ils déménagent, ils déménagent toujours ensemble. Au lieu d'avoir chacun leurs choses et chacun leur tablette dans le frigo, ils partagent pratiquement tout. Ils se répartissent les tâches ménagères, font une seule épicerie pour les trois et mon amie fait à manger pour les deux autres. Bref, à mon avis on peut dire qu'ils constituent clairement un foyer, même s'ils sont plus de deux adultes et qu'ils ne sont pas amoureux les uns des autres. Même chose pour deux de mes grand-tantes, deux sœurs, qui étaient restée vieilles filles et qui cohabitaient. Lorsque l'une des deux est décédée, il me semblait logique que l'autre hérite de ses biens comme si elle eut été sa veuve, même si elles étaient sœurs et pas conjointes. Un autre cas analogue est celui de l'un de mes amis qui, bien qu'ayant presque trente ans, habite toujours chez sa mère. Leur relation n'est pas du tout la même que s'il était toujours enfant; lui et sa mère se partagent les dépenses comme pourrait le faire un couple. Donc pourquoi les membres de ce type de foyers ne mériteraient-ils pas les mêmes droits qu'un couple d'amoureux (hétéro ou homo)?

Dans ma réflexion précédente à propos du mariage, je vous proposais de remplacer l'union de fait (automatique) par trois types d'unions différentes – cohabitation, coparentalité et copropriété – qui seraient également «de fait» et donc ne nécessiteraient aucun contrat ou rite. Mais, tandis qu'être parents d'un même enfant ou copropriétaires d'un même bien est une relation impliquant tacitement des obligations mutuelles, la cohabitation à elle seule ne nous renseigne pas nécessairement sur le niveau d'engagement de deux personnes. Il est possible pour deux personnes d'être domiciliées à la même adresse pendant une longue période sans avoir pour autant d'engagement analogue à celui d'une relation conjugale. Conséquemment, il me semble nécessaire d'avoir une sorte de contrat, comme le mariage, pour définir plus clairement les droits et responsabilités de gens qui cohabitent.

Je propose donc que l'on conserve le mariage mais qu'on le renomme foyer et qu'on le redéfinisse pour que deux ou plusieurs adultes vivant ensemble puisse s'unir légalement et fiscalement en foyer quelle que soit leur relation intime. Ce pourrait être:
  • Un couple d'amoureux;
  • Un jeune adulte qui vit chez ses parents;
  • Une personne âgée qui habite chez son enfant;
  • Des amis qui vivent ensemble;
  • Des frères et/ou sœurs qui vivent ensemble;
  • Une unité polygame;

Il ne serait pas pertinent de mettre un nombre d'adultes maximum par foyer, simplement spécifier que les membres d'un même foyer doivent cohabiter et donc le nombre maximum d'adultes pour un même foyer est fixé par le nombre maximum qui peuvent crédiblement habiter à l'adresse où il est domicilié. En l'absence d'un tel contrat, le niveau d'engagement mutuel de deux cohabitants serait présumé le plus faible possible (deux colocs qui se parlent à peine). Le foyer ne servirait qu'à officialiser et expliciter un rapport de cohabitation; le lien de coparentalité et de copropriété serait distinct et nullement influencé par le fait de s'unir en foyer avec quelqu'un.

Parallèlement, comme je l'ai déjà mentionné, je retirerais toute reconnaissance légale aux mariages religieux. Ce ne serait plus que symbolique et l'on n'aurait donc pas à nous soucier que telle religion interdise le mariage gay ou que telle autre autorise le mariage polygame. Le mot «mariage» ne voudraient rien dire légalement, il appartiendrait aux individus de lui donner le sens qu'ils veulent. Cette institution continuerait donc bien évidemment d'exister mais, comme la religion, elle serait séparée de l'État.

Nous sommes dans des sociétés individualistes et c'est globalement une bonne chose puisque cela émancipe l'individu de toute oppression de la part du groupe. Mais, cela ne doit pas nous empêcher de reconnaître, de faciliter et de donner un statut légal à certaines formes de collaborations entre les individus; en autant que cela soit fait en respectant la liberté individuelle. Que le mariage conjugal en lui-même ait une valeur légale me semble être à la fois une formule trop rigide et une trop grande intrusion dans la vie privée. Le genre de rapport que j'entretiens avec les gens avec qui je partage mon logis ne concerne pas l'État. Ce qui le concerne c'est que nous constituons un foyer, pas que nous soyons amoureux.

3 commentaires:

  1. Pas absurde et qui remet le mariage a sa vrai place d'aggrégat traditionel d'un contrat civil, de règles fiscales et successoriales, et d'un geste symbolique privé.

    Sur les poly-mariages, ma douce qui s'est attaquée ayu problème de la polygamie me faisait remarquer que au delà de deux, il est difficile que tout le monde soit traité équitablement.
    Le cas des enfants, ou des parents dépendants, institue une relation asymétrique, mais pour les adultes en triouple et autre, c'est pas simple...

    le débat en france s'est focalisé, en éliminant l'homophobie qui en secret est le moteur essentiel des critiques, sur la question de la parentalité.

    a noté que a coté de cette communauté en tant que beau père d'enfants abandonnés par leur donneur de sperme, je défends l'étude en compélment du status du "co-parent"...
    je n'ai pas le droit d'adopter a l'international, et si le père était un bon père, je ne souhaiterais pas lui enlever ses droits.
    mais a l'opposé mes beaux enfants ne peuvent pas hériter de moi équitablement (c'est interdit sauf pour une part réservataire mineure), et je n'aurais jamais de droit de visite légal.

    là aussi on a malangé dans un contrat de mariage des règlementations de filiation, de sucessions, d'immigration, qui excluent une filiation "de facto" par des adultes "concernés" mais non "propriétaires" des enfants...

    or aujourd'hui les enfants sont de moins en moins des propriétés mais des sujets d'attentions partagées, par des adultes qui n'exigent pas plus que le droit d'exprimer leur affection en échange des responsabilités.

    il est temps de désinbriquer les législation familiales pour les faire correspondre à la réalité, de moins en moins génétique et stable, des relations humaines.

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  2. Par rapport à la polygamie, c'est sûr que c'est plus compliqué dans les rapports intimes d'entretenir plus d'une relation conjugale à la fois, mais ça c'est le problème de ceux qui choisissent de vivre comme ça. Par ailleurs, ma proposition ici ne distingue pas la relation d'épouse de celle de co-épouse, ce qui me semble plus simple. En ce qui me concerne, je pense qu'une redéfinition du mariage, qui ne porte pas de jugement sur le sexe des partenaires, ce doit également de ne pas juger leur nombre (deux ou plus) ni leur type de rapports (amour, amitié, famille).

    J'exprime mon opinion sur cette question dans ma réflexion sur la polygamie.

    Je suis intrigué par ce que vous entendez par «beau père d'enfants abandonnés par leur donneur de sperme». S'agit-il d'un vrai «don de sperme» ou est-ce un homme qui, au départ, laissait sous-entendre à sa conjointe qu'il allait élever ses enfants avec elle mais qui l'a, finalement, abandonné avec leurs enfants? En tout cas, j'ai également une opinion sur ce genre de situations. J'en parle dans ma réflexion sur la paternité et dans celle sur les liens du sang.

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    1. c'est un père défaillant... qui a divorcé et s'est sauvé pour refaire sa vie.
      Une pratique courante.

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