samedi 15 février 2014

Ce n'est pas dans le Coran

Lorsque quelqu'un revendique le droit de porter le voile – eh oui, encore ce sujet-là! – au nom du droit à la liberté religieuse, certains arguent qu'on devrait l'interdire puisque ce commandement n'est pas dans le coran ou découle d'une mauvaise interprétation de ce dernier. Par ailleurs, la majorité des musulmanes ne portent pas de voile, plusieurs imams sont même contre, donc on pourrait l'interdire puisque cela n'enlève à personne le droit de croire en l'islam.

Je vois un problème dans cette catégorie d'arguments. En fait, c'est bien d'utiliser la théologie ou l'autorité des écritures saintes ou d'un clergé pour tenter de convaincre une personne d'abandonner une pratique ou un croyance. Utiliser l'origine et la raison d'être sociohistorique des coutumes religieuses est également un bon argument. On pourrait même intégrer ça dans les cours de cultures religieuses, de façon à ce que les gens aient une meilleure perspective sur ces pratiques et puissent s'en émanciper. 

Mon problème est plutôt avec ceux qui veulent interdire une pratique religieuse qu'ils désapprouvent en utilisant le prétexte qu'elle ne fait pas partie de l'interprétation reconnue de la religion. Pour moi, c'est important que la liberté de croyances et d'incroyances soit une liberté pour l'individu. L'État n'est pas là pour déterminer quelles pratiques sont orthodoxes et lesquelles sont hérétiques. Que ce soit dans le coran ou non nous importe peu, puisque nous ne reconnaissons aucune révélation divine. L'opinion des prêtres, des imams ou des rabbins sur le sujet n'importe pas plus que celle de n'importe qui d'autre, puisque nous ne reconnaissons pas l'autorité des clergés. Ça a aussi quelque chose de discriminatoire envers les petites religions non reconnues.

Bref, si l'individu croit que c'est important de s'adonner à telle pratique contraignante, c'est ça sa croyance et il faut le respecter là-dedans. On ne peut pas forcer inutilement une personne à être un mauvais pratiquant selon sa propre conception. Parce que, si nous ne reconnaissons pas le caractère sacré d'un livre ou d'un clergé, nous reconnaissons la liberté individuelle comme «sacrée». Ce n'est donc qu'au nom de celle-ci qu'on peut la limiter. Si on arrive à faire comprendre au croyant qu'il peut abandonner cette pratique, tant mieux. Mais sinon, il sera paradoxalement plus libre en s'obligeant à la faire que si on l'oblige à ne pas la faire.

2 commentaires:

  1. Je suis d'accord. D'où tout le ridicule de la charte québécoise des valeurs.

    D'autant plus que le voile préexiste à l'Islam. Ce n'est donc pas un "signe religieux ostentatoire", c'est un trait culturel traditionnel. Si on veut interdire le voile sous le prétexte que c'est un symbole de la soumission de la femme, disons-le comme ça au lieu de dire qu'on l'interdit parce que ce serait religieux.

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  2. Un exemple dans l'actualité de quelque chose en lien mais inverse. Les Sikhs qui travaillent aux ambassades canadiennes peuvent désormais porter le kirpan mais, ce droit de porter un couteau n'est réservé qu'aux Sikhs, et ils doivent porter aussi tous les autres symboles de leur foi pour démontrer qu'ils sont vraiment des pratiquants.

    Donc ici, deux choses que je m'oppose: bien sûr, donner des droits différents selon la religion, mais surtout c'est reconnaître l'orthodoxie religieuse sikh. L'État se prononce indirectement sur qui est un bon pratiquant sikh et qui ne l'est pas. Et si je suis membre d'un schisme sikh qui réclame le kirpan mais pas les autres symboles sikhs? Qu'est-ce que je fais? (En plus, le kirpan pose le problème de pouvoir servir d'arme)

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