jeudi 10 mai 2012

De l'absurdité du suicide

Mise en situation:
Vous êtes dans une très grande pièce remplie de boîtes. Disons, un entrepôt. Vous ne savez pas ce qu'il y a dans les boîtes ni ce qu'il y a en-dehors de la pièce. Vous pouvez ouvrir toutes les boîtes que vous voulez; certaines contiennent des choses agréables, d'autres des choses désagréables, et certaines plus rares vous ferons expulser de la pièce si jamais vous les ouvrez. Vous pouvez quitter la pièce par vous-mêmes à tout moment si vous le désirez mais, une fois sorti, vous n'aurez plus le droit d'y revenir par la suite. On vous a également avisé qu'après un certain temps vous serez expulsé de la pièce, mais vous n'avez absolument aucune idée de la quantité de temps qu'il vous reste.

Comment agir dans cette situation? Puisque vous ne pourrez plus revenir dans la pièce une fois sorti, puisque vous serez forcé d'en sortir un jour ou l'autre, et puisque la pire chose pouvant arriver lorsque vous ouvrez une boîte est d'être expulsé de la pièce, alors vous conviendrez avec moi que la chose la plus logique à faire est de rester dans cette pièce aussi longtemps que possible en ouvrant autant de boîtes que possible.

En fait, je fais ici une métaphore pour décrire la vie. Les boîtes représentent toutes les expériences que nous pouvons vivre. Il y en a des agréables, des douloureuses et d'autres qui peuvent nous tuer, mais sommes tous voués à la mort en bout de ligne. C'est une des raisons pour lesquelles je ne me suiciderai jamais; à moins d'être en phase terminale d'une maladie douloureuse. Quels que soient les malheurs qui puissent me frapper, je me dis que puisque je vais mourir un jour ou l'autre de toute façon, il serait absurde de devancer cette échéance alors qu'il reste encore des expériences positives que je pourrais vivre d'ici là.

Que l'on croit ou non à une vie après la mort, même s'il y en avait une (ce dont je doute) et qu'elle serait mieux que celle-ci, il vaudrait quand même la peine de profiter à fond de notre vie présente avant de passer à une vie future. Autrement on gaspille du bonheur potentiel. À moins de croire que dans notre vie future on reçoit une récompense proportionnelle à la souffrance dans notre vie présente, il n'y a pas de raison que de ne pas profiter de cette dernière, dans la mesure où on le fait en respectant les besoins d'autrui.

Si jamais il m'arrivait une situation m'enlevant le goût de vivre, par exemple si je perdais tout ceux qui me sont chers, il serait quand même insensé de passer au suicide. Dans le pire des cas, je me mettrais simplement à vivre de façon exagérément hédoniste, en ignorant les conséquences sur ma santé, quitte à compromettre jusqu'à ma survie, mais sans jamais me suicider directement. J'optimiserais mon bonheur.

Mais bon. Ici je parle comme si le suicide était une décision rationnelle. Celui qui connaît cette fin a souvent l'esprit altéré par la dépression. Ce n'est pas un vrai choix lucide.

5 commentaires:

  1. Si les dix ou quinze dernières boites contenaient de mauvaises choses, on peut en venir à penser (par induction) qu'il n'y aura plus que de mauvaises choses à vivre dans les autres boites, et que les ouvrir n'en vaut pas la peine.
    On pourra ajouter que dans la vie, les boites ne sont pas indépendantes, et qu'on peut éventuellement prévoir avec une bonne confiance que les dix ou quinze boites à venir seront de pire en pire.
    La volonté de continuer à ouvrir des boites ne tient qu'à l'espoir d'y trouver de bonnes choses.

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  2. Le suicide n'est pas une fin en soit, elle n'est qu'un moyen pour mettre un terme à une souffrance quand celle-ci devient plus insupportable encore que la mort elle-même. Alors justement, qu'est-ce que tu fais du facteur souffrance ? Ton analogie ne la prend pas en compte. Si tu veux qu'elle soit correcte, rajoute que ton mec est en train de brûler vif dans sa boîte, par exemple, et qu'ouvrir une mauvaise boîte risquerait de le brûler vif encore plus. Les gens ne se suicident pas sans raison.

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  3. Si la personne souffre et que la mort est la seule façon de ne plus souffrir, alors effectivement le suicide devient un choix parfaitement logique et éclairé. Dans ma métaphore, ce serait comme si toutes les boîtes qui restent à ouvrir ne contenaient que des choses négatives.

    Mais si la personne a tord de croire qu'il ne reste que de la souffrance dans sa vie. Si elle vient d'ouvrir une série de boîtes négatives, et qu'elle en a déduit qu'il ne reste que des boîtes négatives, mais qu'en réalité il reste plein de boîtes avec des choses agréables dedans, alors elle aurait effectivement tord de s'arrêter là.

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  4. Il ne faudrait pas oublier que nous ne sommes pas tous égaux dans la vie et qu'un enfant malformé, par exemple, aura sans doute plus de "chances" d’ouvrir de mauvaises boîtes que les autres. Ça serait bien si la vie consistait juste à "ouvrir des boîtes" avec à chaque fois les mêmes chances de réussite pour tous, mais c'est pas le cas. Bref, je ne suis pas d'accord pour dire que le suicide est une absurdité comme si la raison du suicide tenait juste à un mauvais calcul statistique. C'est peut-être le cas pour ceux qui agissent sur un coup de tête suite à une mauvaise expérience alors que l'avenir leur sourit encore, mais je ne pense pas que ça soit représentatif du suicide en général.

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  5. Je suis d'accord avec John et avec Q.

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