jeudi 23 avril 2009

Le glorieux destin des télécommunications

On pourrait dire que, dans l'histoire de la communication, l'émergence des télécommunications constitue, non pas une, mais plusieurs révolutions successives. Et, en dépit de tous ses détracteurs, FaceBook me semble l'aboutissement naturel, logique et même désirable de cette progression. Il en va de même pour Twitter et les blogues. Bien sûr, on peut dire que ce système est encore en rodage, mais il pourrait constituer ultimement une forme « d'intelligence collective » pour l'humanité. Laissez-moi vous expliquer tout ça en reprenant l'histoire des télécommunications.

Bon, il y eut d'abord la radio puis la télévision. Évidemment, c'était un progrès que de permettre à l'information de transcender l'espace, mais il n'y avait alors que l'élite qui pouvait occuper le statut d'émetteur. Il restait à démocratiser le procéder. Apparu alors le téléphone, successeur du courrier et prédécesseur du courriel et du tchatte – avec ou sans webcam. Cela permet donc à n'importe qui de communiquer avec n'importe qui, sans égard à la distance géographique. Mais la communication verbale n'est pas tout. Entretenir une conversation n'est pas la seule façon de transmettre ou de recevoir de l'information. Parallèlement, il y a le web. Un immense catalogue d'informations permettant à tout le savoir humain d'être accessible pour tout être humain. C'est comme une bibliothèque mais c'est infiniment plus facile d'y faire une recherche. Bien sûr, l'information y est moins rigoureuse, mais celui qui sait adroitement y faire le tri y trouvera une mine d'or de connaissances. Wikipédia incarne la « mémoire collective » où est stocké tout le savoir de l'humanité et accessible à toute l'humanité.

C'est là qu'arrivent Facebook, Twitter et les blogues! L'aboutissement de tout ça. C'est comme si chaque personne devenait une page web. Je puis transférer mes souvenirs dans un endroit pour les rendre accessibles à tous. J'ai le pouvoir de rendre public mon état émotionnel du moment. Les photographies de ma personne – qui « immortalisent » un instant de ma vie – sont désormais accessibles pour tous mes proches. Mon réseau social est cartographié. Chaque événement de ma vie est enregistré. Je peux plus facilement partager mes réflexions, mes sentiments et mes opinions avec quiconque le désire. Je peux m'adresser à quelqu'un de lointain et décider que notre conversation soit visible de tous (en écrivant sur le wall), comme si nous étions tous dans un même lieu dans un même moment. Et ce que je trouve le plus merveilleux, c'est que je peux suivre la vie de gens que j'avais perdu de vue sans même avoir à leur parler directement. Ça a l'air de rien, mais les conversations ordinaires sont bourrées de rites et de tabous (salutations, formules de politesses, introduction d'un sujet, etc.) qui « nuisent » à la communication (libre circulation des informations). On en apprend plus les uns sur les autres en devenant amis sur Facebook qu'en se demandant : « Quoi de neuf? » Et, demander une amitié sur Facebook est plus facile et socialement plus acceptable que de téléphoner à quelqu'un qu'on n'a pas vu depuis dix ans.

Bien sûr, tout cela est encore à un stade plutôt embryonnaire et est bourré de « pollution » intellectuelle. Mais lorsque l'on aura appris à discerner l'information qu'il vaut la peine de partager de celle qui n'est pas pertinente, on pourra plus facilement être à l'écoute des besoins des autres et faire progresser la science. Quand les idées peuvent circuler aussi facilement d'un cerveau à l'autre au travers du monde, leur progression est favorisée. D'un point de vue éthique, tout cela m'apparaît pleinement positif. Bien sûr, la notion de « vie privée » telle qu'on la conçoit à notre époque ne sera plus d'actualité si on continue comme ça, mais je n'y vois rien de mal. Pour moi, ce que l'on croit être de la pudeur est peut-être finalement de la gêne et du renfermement sur soi. L'antidote à l'excès d'individualisme qui caractérise notre société est peut-être justement ce revirement extrême vers un « exhibitionnisme » tel que Facebook.  

4 commentaires:

  1. J'ai essayé Facebook, mais je trouve cela vraiment tristement navrant. C'est le vide la communication. J'ai retrouvé des personnes que je n'avais pas vues depuis trente ans, mais à la réflexion, je me suis rendu compte que ce qui nous unissait à cette époque n'est plus vraiment mon ordinaire actuel. Conclusion : si la vie nous a séparés, il y avait sans doute des raisons. On est plus, à passé cinquante ans, ce que l'on était à vingt.

    Ce type d'initiative de communication me semble plutôt motivé par une récolte de données personnelles qui devraient permettre d'affiner nos profils pour les publicitaires. Considérant la publicité comme un polluant informationnel, je pense donc pis que pendre de Facebook et initiatives du même genre.

    J'ai participé à wikipedia, et si internet doit afficher quelque chose dans son bilan positif, c'est bien wikipedia. Je ne suis pas un bon "écrivain" wikipedia. Je suis trop digressif, et en plus j'aime ça. Cela tient sans doute à mon côté autodidacte qui favorise le papillonnage. On ne se refait pas.

    Je me suis mis aux forums. Malgré près de dix ans d'expérience, j'ai toujours été déçu par le côté "foire d'empoigne" que prennent les débats. Si on peut encore appeler cela des débats. Les gens ne savent pas collaborer. Ils imaginent que l'intelligence n'a pour finalité que d'être étalée. J'ai continué parce que j'aime écrire, mais je n'ai pas vraiment l'impression que les forums contribuent à la communication telle que je la conçois.

    Ce qui freine les forums dans une véritable communication, c'est qu'au-delà de la forme et du fond affiché, c'est d'abord la motivation qui s'exprime. Il y a une fonction des forums qui est très peu utilisée, et qui pourtant pourrait éliminer la motivation personnelle à débattre : le message privé.

    Si s'ouvrait un forum qui obligerait chacun des membres à créer un article à publier avec "chacun" (très important) des autres membres, et non pas seulement avec ceux avec qui l'on a des affinités, non seulement le fond du débat retrouverait son véritable rôle et l'on éliminerait du débat la motivation personnelle qui n'a rien à y voir. Mais je ne crois pas que la volonté des participants aux forums soit de renoncer au stupide rapport de force qui implique la création de noyaux durs. Si la science est ce qu'elle est, c'est surtout parce que les scientifiques ont appris à travailler en équipe.

    Reste le blog qui permet de s'exprimer sans avoir à vraiment subir les assauts des narcissiques du rapport de force, en tout cas dans une moindre mesure puisque l'on y est à la fois le seul admin et le quasi seul auteur. Pour un humaniste qui aime partager et collaborer, c'est assez frustrant, mais force m'est de reconnaître que sur dix ans de forums, je n'ai pas rencontré dix personnes capables d'écrire en équipe et de travailler à charge et à décharge. Cela relativise évidemment l'impact de l'humanisme, et cela démontre également le règne absolu de l'individualisme qui est une véritable babélisation de la communication.

    Alors, j'écris parce que j'aime écrire, et parce que cela fixe ma pensée à un moment donné. Quant à communiquer, je ne crois pas dépasser le monologue de l'écrivain face à sa feuille. Ce qui est bizarrement paradoxal, c'est que je traîne une réputation de "montreur du doigt", voire même de troll, sur internet, alors que dans la vie, les personnes qui me connaissent trouvent que je suis plutôt un compagnon agréable. On ne contrôle pas la perception que les autres ont de vous sur internet. Cela tient, sans doute, à l'absence de protocole dans les rencontres sur le net.

    RépondreEffacer
  2. Vous dites : « Ce type d'initiative de communication me semble plutôt motivé par une récolte de données personnelles qui devraient permettre d'affiner nos profils pour les publicitaires. Considérant la publicité comme un polluant informationnel, je pense donc pis que pendre de Facebook et initiatives du même genre. »

    Je vous dirais que la pub est polluante justement parce que c'est majoritairement composée d'informations qui nous sont personnellement inutiles. Si les trucs comme Facebook permettent aux publicistes de mieux cibler leur clientèle potentielle et donc de n'envoyer une publicité à quelqu'un que lorsque c'est une information pertinente pour cette personne, alors je pense que c'est une bonne chose. Par exemple, si je n'avais à regarder les pubs de chars que pendant les période de ma vie où je cherche justement à m'acheter un véhicule, il me semble que ce serait moins pire que d'avoir à les endurer en permanence.

    RépondreEffacer
  3. Dans sa motivation affichée, la publicité existe pour faire connaître le produit du fabricant à celui qui est susceptible de l'acheter.

    Dans un système en concurrence, tous les coups sont permis. La véritable motivation n'est plus le service rendu, mais la propre survie de l'entreprise, que ce soit celle du fabricant ou celle du publicitaire.

    Ce n'est pas le bien final du client qui est recherché, mais bien l'argent qu'il peut dépenser chez le fabricant X et pas chez le fabricant Y

    Le publicitaire, lui, est un parasite de cette guerre que se livrent les fabricants. Il est chargé d'élaborer l'image forcément incomplète du produit puisqu'il vend du rêve, mais évitera surtout d'aborder l'aspect cauchemardesque du rêve. C'est de la propagande* au sens le plus stricte du terme. Et comme les publicitaires n'ont pas vocation à ouvrir une boîte de pub, pour ne faire qu'une seule campagne, ils mangent à tous les râteliers pour "nourrir" la boîte. La fin justifie les moyens.

    Il est étonnant que quelqu'un qui lutte contre l'obscurantisme puisse faire l'apologie d'un système dont la finalité est de propager une information qui n'affiche que sa forme, qui ne parle pas du fond, et surtout qui cache sa principale motivation.

    Si vous imaginez que le véhicule que vous allez acheter sera meilleur parce que le message publicitaire qui en aura été fait aura su vous impressionner, vous tombez dans le piège de la propagande.

    Si vous imaginez que la motivation cachée de la pub sera différente parce qu'elle permettra de mieux cibler votre profil, sa propagande sera d'autant plus efficace sur vous.

    La publicité n'a qu'un seul objectif, celui du monopole de l'information afin de favoriser sa propre croissance. Pour vous en convaincre, le patron d'une grande télévision privée de France avouait, sans honte, que les émissions de télévision diffusées sur sa chaîne "n'avaient pour but que de faire patienter les téléspectateurs entre deux plages publicitaires". Autrement dit, que sa chaîne avait vocation à surtout faire de l'argent, et que l'information n'était qu'un appât !

    Propagande : Action systématique exercée sur l’opinion publique pour l’amener à accepter certaines idées ou doctrines.

    RépondreEffacer
  4. Je ne suis pas en train de dire que la publicité est une bonne chose. Au contraire! C'est quelque chose à quoi je m'oppose tout autant que toute autre forme d'obscurantisme.

    Je dis simplement qu'une publicité «ciblée» est un moindre mal par rapport à l'aspect actuelle de la publicité. Ça réduirait le nombre de pubs que chaque individu recevrait et ces pubs seraient plus pertinentes pour l'individu (même si elles seraient tout aussi fallacieuses).

    RépondreEffacer