L'orgueil est une émotion que l'on pourrait qualifier de paradoxale puisqu'elle crée chez l'individu des comportements menant au contraire de ce vers quoi il voulait aller.
Par exemple, si, par orgueil, je désire avoir raison lors d'un débat, que va-t-il se passer? Si je comprends que j'ai tord pendant le débat, mon orgueil fera que je vais continuer de m'acharner à défendre mon opinion initiale juste pour que l'on croit que j'ai raison. Mon désir d'avoir raison va faire en sorte que je vais volontairement continuer d'avoir tord. Quelle ironie… Un être sans orgueil a toujours raison puisqu'il change instantanément d'opinion lorsqu'on l'en convainc, il est toujours à jour.
Si, par orgueil, je veux prouver à quelqu'un qu'il n'a pas d'influence sur moi, que va-t-il se passer lorsqu'il me donnera un conseil? La conséquence sera que je vais m'arranger pour ne pas suivre son conseil, même si je le juge très bon et même si j'y aurais pensé par moi-même. Pour avoir l'air de ne pas être affecter par l'autre, je vais systématiquement faire le contraire de ce qu'il me dit. Mon désir de ne pas être influencé va faire en sorte que je vais être influencé (mais inversement). Quelle ironie…
L'orgueil est donc une émotion qui n'est source que de nuisance pour l'individu et son entourage. Il faut donc s'émanciper de cette hypertrophie de l'ego.
Il n'y a qu'une seule façon de s'émanciper de l'orgueil, c'est d'aller à la rencontre de l'autre. Il faut se faire violence et accepter aussi qu'il faille faire violence à l'autre autant qu'on lui veut du bien. Et il y a du mal qui fait du bien à l'autre, et qui nous empêche de désespérer de nous-même. La réciproque est, bien entendu, salutaire, si l'intention l'est aussi.
RépondreEffacerMon contre-poison à mon propre orgueil, c'est un humanisme jusqu'à la déraison. Souvent, je me suis posé la question de la raison. Alors, je tombais dans ma propre fascination. J'en arrivais comme Nietzsche à penser : "Sois toi-même, sans faiblesse, logiquement, et jusqu'au bout".
En fait, tourner sur soi-même avec soi comme seule référence, est d'une facilité qui confine à la lâcheté. Une lâcheté qui croît (croître) en nous et qui n'a d'égal que la croissance de notre propre orgueil.
Le rapport de force pour la raison du plus fort est stupide, aberrant, si la finalité de ce rapport n'est pas l'alliance du plus fort et du plus faible, car rien ne permet de penser que le rapport de force ne s'inversera pas.
C'est facile de parler en prenant la raison comme allié. C'est autre chose, de bien plus complexe, que de comprendre la déraison jusqu'à la rendre raisonnable. Il faut se déshabiller jusqu'aux tréfonds de soi-même. Ne pas laisser un seul coin d'ombre où l'on pourrait se cacher à soi-même.
Débusquer notre véritable motivation qui se cache derrière la forme et le fond de notre propos, et oser l'exposer en sachant que l'on va prendre les coups de l'incompréhension de l'autre, des autres.
Être "humain", c'est tout prendre de l'humanité. Le pire comme le meilleur. Alors, on comprend pourquoi l'homme faute. On comprend que c'est son incapacité non pas à se dépasser, mais à vouloir se dépasser, qui le pousse à la faute.
L'être humain n'est qu'une carcasse vide qui n'est qu'un support à l'information. Information qu'il doit transmettre sous peine de voir la carcasse se vider à sa mort, et l'information perdue pour tout le monde.
Le véritable orgueil, c'est de croire que l'on est immortel parce que l'on n’a jamais vécu sa propre mort. Si l'on était immortel, le rapport de force serait vraiment la finalité de l'existence. Alors, oui, l'orgueil serait une vertu.
Croyez-vous que je commente vos articles par orgueil? Comment, dès lors, oserais-je me prétendre humaniste? Mais il est vrai que derrière la forme et le fond, chacun peut cacher un prédateur. Faire confiance, c'est prendre un risque. Mais ne pas prendre de risque, est-ce humain?
Apprivoisons-nous, mon cher. Il faut apprendre à se connaître pour cela. N'est-ce pas ce que font les hommes depuis la nuit des temps?