Quand on pense à un comportement pris en lui-même et que l'on se demande, par exemple «L'alcoolisme est-il génétique?» ou «L'orientation sexuelle est-elle causé par le vécu?», on pose une mauvaise question, ou plutôt une question incomplète.
Supposons que je me demande si l'intelligence est innée (génétique) ou acquise (environnementale). Je puis faire l'expérience de prendre deux humains. Disons, des jumeaux identiques ayant été adoptés à la naissance par des familles différentes, appartenant à des cultures différentes et des classes de revenus différentes. Ou à l'inverse, deux frères adoptifs chacun originaire d'un continent différent. Dans les deux cas, si j'ai posé la question de manière erronée comme je le fais ici, je risque d'en conclure que l'intelligence est acquise, causée par l'environnement familial et social.
Si je me pose la même question sur l'origine de l'intelligence, avec la même dualité fictive innée/acquis mais que les deux individus que je choisis de comparer n'appartiennent pas à la même espèce. Supposons que je compare un humain et un chien qui aurait été élevés tous les deux dans la même famille (d'humains). Imaginons que l'on ait tenté, avec toute la bonne volonté du monde, d'apprendre au chien les mêmes choses qu'à l'humain comme l'usage de la parole ou de la toilette. Dans cette expérience, arriverai-je à la même conclusion? Mon résultat sera plutôt que l'intelligence est génétique.
Comment expliquer que la réponse à la question soit différente selon les individus comparés? Probablement par le fait que l'hypothèse de départ était mal construite. La formulation correcte ne serait donc pas «Ce trait est-il génétique ou environnemental?» mais «La variation de ce trait entre cet individu et cet autre individu est-elle génétique ou environnementale?» puisque, pour le même trait, la réponse changera selon les individus sélectionnés.
Personnellement, plutôt que de me représenter l'innée et l'acquis comme deux sortes de variables qui s'additionnent pour former l'individu et ses comportements, je vois l'innée comme une sorte d'éventail de possibilités et l'acquis comme la sélection de l'une de ces possibilités. Par exemple, l'innée d'un bébé lui offre le potentiel de parler français, anglais, mandarin ou aucune langue du tout, mais c'est son acquis qui fixera laquelle de ces potentialités sera choisie.
Aussi, il est d'usage d'avoir recours à la dichotomie inné/acquis et à celle génétique/environnement (ce qui est pratiquement la même chose), mais il me semble que l'on pourrait diviser les choses autrement. Par exemple, en distinguant plutôt les variables internes à l'individu des variables externes. Ainsi, ce qui est «interne» à l'individu serait ses gènes mais aussi les acquis qu'il a à un instant t. Ces facteurs définissent la fourchette des potentialités que pourrait devenir l'individu, et ses expériences futures (les variables externes) fixeront ce qu'il sera vraiment.
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