Depuis la dernière élection fédérale, il est plus que jamais limpide que le Québec n'a pas sa place au sein du Canada. Alors que la majorité des Canadiens ont élus un gouvernement de droite majoritaire, ce même gouvernement a eu un succès presque nul au Québec dont la majorité a élu une opposition de gauche. Comme je l'ai dis précédemment dans ma réflexion sur la séparation, qu'il y ait deux cultures fondatrices n'est pas un problème en soi, le problème c'est que cette division culturelle entraîne une forte division d'orientation politique.
Bref, j'étais en train de me demander comment on allait se diriger vers la souveraineté. Quelle place un parti souverainiste devrait-il donner à ce projet dans son agenda? Traditionnellement, on faisait un référendum en se disant qu'on se séparerait si le OUI gagnerait. Je me disais que l'on devrait peut-être inverser notre stratégie: Commencer par essayer de donner au gouvernement provincial autant d'autonomie que possible par rapport au fédéral sans pour autant sortir de l'union canadienne, puis, lorsqu'il ne sera plus possible d'en acquérir plus (soit parce que le fédéral s'y opposera, soit parce qu'obtenir un statut de pays resterait la seule liberté que nous n'ayons pas acquise) on déclenche un référendum sur la séparation.
En fait, la séparation ne devrait pas être présentée comme une fin en soi mais comme un moyen. Le véritable objectif ici est que le Québec acquiert plus d'autonomie, afin de mieux répondre aux besoins de sa population. Sortir du Canada n'est que l'étape finale dans l'accomplissement de cet objectif. Commencer par acquérir l'autonomie avant la souveraineté présenterait l'avantage de clarifier la question référendaire. Si l'on a déjà acquis tout plein d'autonomie sans avoir besoin de se séparer, alors la souveraineté devient surtout une question symbolique de reconnaissance et d'avoir sa place sur la scène internationale à égalité avec les nations souveraines. Si l'on s'est buté à un obstacle dans notre quête d'autonomie à cause du fait que nous demeurions dans le Canada, alors on sait beaucoup mieux pourquoi l'on devrait se séparer.
La stratégie qui devrait être en place c'est de saisir toute juridiction que le fédéral néglige ou délaisse et de créer une instance provinciale pour s'en occuper. Par exemple, si le Canada ne veut plus de registre des armes à feu, pourquoi ne pas en faire un pour le Québec? Si le Canada investit moins dans la culture, le Québec devrait riposter en investissant plus dans la culture. Si le fédéral ne veut plus du bilinguisme dans l'armée, pourquoi le provincial ne financerait pas en partie une division francophone de l'armée canadienne? Pourquoi ne pas immédiatement créer une société d'État de livraison qui concurrencerait Poste Canada? En clair, on devrait immédiatement mettre en place des institutions provinciales qui seront indispensables dans l'éventualité où l'on se séparerait mais qui auraient tout de même leur raison d'être pendant que l'on demeure au sein du Canada.
Une autre stratégie qui devrait être utilisée serait d'essayer de réduire au minimum les interactions entre le citoyen et le fédéral, par exemple en offrant de remplir pour lui tout formulaire, rapport d'impôt, demande de subventions, demande de passeport, d'acquisition de sa citoyenneté, etc. Bref, que le citoyen (ou le futur citoyen) puisse n'interagir qu'avec le provincial s'il le veut, qui lui-même se chargera à sa place de transiger avec le gouvernement canadien. Ultimement, ce pallier gouvernemental deviendrait donc de plus en plus superflu dans l'univers du citoyen, comme une sorte d'intimidateur qui lui taxe son argent sans rien lui apporter en retour.
En gros, ce que j'essaye de dire, c'est que l'accession à la souveraineté n'est pas quelque chose qui peut se faire spontanément suite à un référendum. C'est un long processus. Mais si ledit processus est déjà enclenché et que la population peut en voir les effets bénéfiques, alors le référendum lui-même aura plus de succès.
"En clair, on devrait immédiatement mettre en place des institutions provinciales qui seront indispensables dans l'éventualité où l'on se séparerait "
RépondreEffacerC'est déjà le cas pour le Ministère de l'immigration qui délivre les CAQ (certificats d'acceptation du Québec). Une fois ce papier obtenu le fédéral demande exactement les mêmes documents initiaux pour délivrer le permis officiel canadien qui permet l'entrée sur le territoire. D'après ce que m'ont dit des amis ce double système aurait été mis en place dans la même optique que celle expliquée dans votre billet.
La contradiction émerge lorsqu'on considère les limitations du Québec en termes de libertés politiques qui sont justement dépendantes du statut de souveraineté du Québec.
RépondreEffacerAutrement dit, pour toute action rendue impossible par le fait que le Québec est une province, nous n'avons aucun recours "en attendant" un éventuel référendum, et ce dernier devient en soi la solution nécessaire pour que ces actions deviennent possibles.
Exactement. C'est exactement ça mon point, Steevie. Il faudrait que le Québec essaye d'acquérir le plus d'autonomie possible, en restant dans le Canada, puis, une fois arriver aux limites que notre condition de simple province impose, un gouvernement provincial séparatiste pourra donner au peuple tous les exemples concrets de libertés qu'il nous manque, et il sera alors plus clair pour le peuple de choisir la souveraineté.
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