Permettez-moi de clarifier la définition que je donne au mot «être» sur ce blogue, c'est-à-dire dans une perspective où
l'esprit n'existe pas en-dehors de la matière.
L'
être se distingue de l'
objet par le fait qu'il est capable de percevoir son environnement (donc d'en construire mentalement une sorte de copie virtuelle incomplète) et d'attribuer à chaque stimulus qui le compose une connotation positive ou négative. Ainsi, il pourra non seulement distinguer deux saveurs, mais il pourra également en préférer une à l'autre. J'appelle ces deux facultés «
conscience» et «
volonté». C'est donc à un niveau relativement primitif que l'être se dote d'une «jauge» opposant son bonheur et sa souffrance; c'est-à-dire ce qui lui est agréable et désagréable. Pour moi, cela justifie d'adopter
l'éthique utilitariste et de
l'étendre à tous les êtres (dans la mesure du possible). C'est par
la sélection naturelle que les êtres seront «programmés» pour trouver désirable ce qui a des chances d'être utile à leur autoconservation et à leur reproduction.
À partir du moment ou une entité possède les critères minimaux que j'ai décris ci-haut (capacité de percevoir et d'apprécier), elle peut revendiquer au titre d'être. Aussi douce que soit la pente d'une plage, la démarcation entre la terre émergée et la terre submergée n'en sera pas moins nette. Pour moi, donc, l'obtention du titre d'être – et donc le droit à la considération selon l'éthique – se fait indépendamment de sa proximité génétique d'avec l'humain. Un vivant dont l'ancêtre commun avec nous est très lointain,
un extraterrestre ne partageant aucun ancêtre avec nous ou
un robot ayant une intelligence artificielle programmée comme la nôtre, mériteraient donc tous d'être considérés comme des êtres s'ils en possèdent les attributs.
Il y a bien sûr un dégradé de nuances qui existe entre l'être et l'objet;
l'univers est un continuum. Je classe dans cette zone grise
les systèmes complexes sans conscience propre tels qu'une population d'animaux (les individus qui la composent sont des êtres mais pas la population en tant que tout) ou un programme informatique. J'y mets aussi les vivants acéphales tels que les végétaux. N'ayant pas de facultés sensorielles ou de système nerveux central, ils sont pour moi moins des êtres vivants que des objets vivants. L'être émerge quand un système complexe acquiert les facultés de l'être ce qui implique un degré élevé de complexité.
L'être que je suis est la somme des interactions entre ses neurones. L'émergence d'un être pourrait se faire à n'importe quelle échelle. Ainsi, il n'est pas exclu d'imaginer qu'un jour les populations d'animaux
eusociaux – qui forment littéralement des superorganismes – acquièrent une conscience collective analogue à celle des individus. Il leur suffirait pour cela d'intensifier et de complexifier leur rapport de
communication. Par exemple, imaginons une cité futuriste dans laquelle chaque citoyen est en contact télépathique permanent avec tous les autres (je sais que c'est impossible, j'ai dis «imaginons…»). Supposons qu'à chaque fois qu'un individu a une idée ou perçoit quelque chose, cette information soit transmises instantanément à tous les autres citoyens se trouvant dans un rayon d'un kilomètre. Que se passerait-il? Mon hypothèse est que cette somme d'individus deviendraient comme un unique être, ayant une conscience et une volonté, de la même façon que la somme de mes cellules.